Shadow banking / Risque systémique
Le parlement va-t-il soutenir un compromis pro-industrie ?
Ce jeudi la Commission Parlementaire Affaires économiques et monétaires du Parlement Européen devra voter sur la réglementation des fonds monétaires (Money Market Funds). Certains fonds du marché monétaire, dits Fonds monétaires à valeur liquidatives constante (CNAV), promettent à leurs investisseurs une valeur de remboursement sécurisé et agissent donc de fait comme une banque d'épargne. Pourtant ces fonds n'ont pas encore fait l'objet d'une réglementation sérieuse. Il s'agit d'un système bancaire parallèle, plus connu sous le terme de Shadow Banking. Pendant la crise financière, l'activité de ces fonds CNAV a notamment accéléré la détérioration rapide des prix des obligations souveraines. C'est pourquoi le Conseil de stabilité financière (CSF) et le Comité européen du risque systémique (CERS) ont tous deux recommandé la disparition de ces fonds.
Eva JOLY, rapportrice fictive Vert/ALE sur le dossier commente la décision à venir:
"Neena Gill, la rapportrice (S&D, britannique), soutenue par les rapporteurs de l'ALDE, du PPE et de l'ECR est sur le point d'enterrer toute velléité d'encadrement d'une activité à risque. Un compromis est en effet susceptible d'être voté, sans pour autant résoudre le risque que représentent ces banques de l'ombre pour la stabilité des marchés financiers européens. À vrai dire, en l'état, ces banques de l'ombre pourraient continuer leurs activités sans presque aucun changement. Après la crise financière, le Parlement européen a imposé un cadre de réglementation bancaire et financière globale malgré la très forte résistance de l'industrie financière. Pour éviter les crises futures, les risques systémiques découlant des banques de l'ombre doivent être également traités. Deux options sont envisageables : ou bien ces quasi-banques doivent se soumettre aux mêmes règles que les banques, ou bien celles-ci doivent disparaître pour préserver la stabilité du système financier.
Au nom du G20, ce même CSF entamera d'ici deux ans une évaluation des avancées législatives en la matière, mettant l'Europe face à ses engagements et ses responsabilités.
Pourtant, les rapporteurs des groupes S&D, PPE, ALDE et ECR semblent prêts à sacrifier la proposition de la Commission européenne de réglementer ces fonds du marché monétaire au seul profit des intérêts des banques de l'ombre. Le CSF avait suggéré de convertir l'ensemble de ces fonds à valeur constante en fonds à valeur variable. La proposition de la Commission, déjà en retrait sur le sujet, se limitait à l'introduction d'une obligation de réserve de liquidité de trois pour cent pour les banques de l'ombre.
Le projet de compromis va plus loin et fait ainsi disparaître l'obligation de réserve liquidative. Seuls les sociaux-démocrates appuient la disparition d'une forme de fonds à valeur constante après une période de transition de cinq ans. Sans affecter les nouvelles catégories de fonds gouvernementaux et fonds de détails, protégés. Comme s'il était utile d'encourager aujourd'hui l'instabilité sur le marché des obligations souveraines.
En raison de désaccords entre socialistes et conservateurs et en raison de la pression des groupes GUE et Verts-ALE, le vote a été reporté à jeudi. Nos groupes vont présenter une proposition alternative de compromis pour s'assurer que ces banques de l'ombre ne puissent pas perdurer.
Par le passé, le Parlement Européen a su à plusieurs reprises être en pointe de la régulation financière. Jeudi, nous verrons se dessiner un nouveau rapport de force au sein de l'assemblée nouvellement élue. Plus proche des lobbies et plus favorable à la dérégulation qu'à la stabilité financière."