TTIP/ISDS
La Commission tente d'enfumer le débat très controversé sur les tribunaux arbitraux privés
Cécilia Malmström présente aujourd'hui devant la Commission commerce international du Parlement une ébauche de propositions de réforme du très controversé mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États (RDIE) prévu dans l'accord commercial entre l'UE et les États-Unis (TTIP).
Pour Yannick JADOT, Vice-Président de la commission commerce international et porte-parole du groupe Verts-ALE sur le TTIP:
"Confrontée à une opposition de plus en plus forte d'acteurs économiques, sociaux, politiques et institutionnels contre le mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États (RDIE ou ISDS), la Commission tente d'enfumer le débat en ouvrant des pistes de réformes peu abouties et qui ne répondent pas à la perversité intrinsèque de ce mécanisme. Après presque deux ans de négociation et de contestation de l'ISDS, la Commission ne fournit toujours aucune démonstration de la nécessité de privatiser la justice au profit des firmes alors que les démocraties que sont l'Union européenne et les États-Unis ont développé des systèmes juridiques robustes et indépendants. Et pour cause, aucune étude de l'OCDE ou de la Banque mondiale n'établit de corrélation positive entre la présence d'un ISDS et les flux d'investissements. Un rapport de la Commission publié en mars confirme même que l'absence d'ISDS dans l'accord de libre-échange avec la Corée du Sud n'est absolument pas un obstacle au développement des investissements.
Les propositions énoncées restent vagues. Très loin d'être sérieuses, celles-ci posent davantage de questions qu'elles n'en résolvent que ce soit d'un point de vue juridique ou de contrôle démocratique. Faut-il y voir le signe d'une fébrilité de la Commission et d'une impossibilité à réformer radicalement l'ISDS ? Je le crois.
Les propositions Malmström sont avant tout une tentative de faire bouger les sociaux-démocrates en les amadouant avec la perspective lointaine d'une Cour permanente ou d'un tribunal international. Chacun sait qu'une Cour permanente publique ne verra le jour qu'en l'absence d'ISDS dans le TTIP ou CETA, en continuant à se reposer à court terme sur les juridictions nationales.
Alors que le Parlement européen négocie en ce moment une résolution sur l'accord de libre-échange UE/États-Unis, les parlementaires ne doivent pas se laisser abuser par des réformes cosmétiques qui ne changent pas la nature perverse de l'ISDS : un système privé, parallèle, supérieur aux juridictions nationales, qui menace notre capacité démocratique à définir nos règles. "