Taux d'imposition effectifs des multinationales dans l'UE
Résumé
Une nouvelle étude commandée par le Groupe des Verts/ALE au Parlement européen, rédigée par un chercheur tchèque Petr Janský, montre que de nombreuses entreprises ne paient pas beaucoup d'impôts dans de nombreux pays de l'UE - en valeur absolue ou par rapport aux taux nominaux, ou à certains autres pays.
Pour estimer les taux d’imposition effectifs (TIE) des entreprises multinationales (EMN), la recherche a utilisé les données non consolidées des EMN d'Orbis, des données imparfaites mais les meilleures disponibles au niveau des entreprises de l'UE. L’étude analyse les TIE et les taux nominaux pour la période 2011-2015 pour les pays de l'UE. La recherche montre que les taux d'imposition effectifs dans l'Union européenne sont bien inférieurs aux taux d'imposition nominaux.
En outre, la plupart des pays semblent taxer les EMN de manière régressive : plus les EMN sont grandes, plus le taux d'imposition effectif est faible. Selon les données disponibles, les multinationales peuvent s'attendre à payer entre 6 % et 30 % (et aussi peu que 2 % ou jusqu'à 49 % dans les cas les plus extrêmes) de leurs bénéfices en impôts.
Constatations
Parmi les 63 pays de l'échantillon final, le Luxembourg a le TIE le plus faible (2,2%) et la Norvège le TIE le plus élevé (48,7%). Dans l'UE, outre le Luxembourg, la Hongrie (7,5%), la Bulgarie (9,5%), Chypre (9,6%) ainsi que les Pays-Bas (10,4%) et la Lettonie (10,6%) affichent les TIE les plus faibles. Au sein de l'UE, l'Italie et la Grèce ont le TIE le plus élevé (30,4% et 28,4% respectivement), les troisième et quatrième plus élevés étant l'Espagne et la Slovaquie (21,8% et 20,2% respectivement). Les 18 autres pays de l'UE (sur les 28 États membres actuels de l'UE) ont des TIE entre 12 % et 20 %. Certaines des plus grandes économies de l'UE se situent dans cette fourchette, notamment le Royaume-Uni (14,9%), la France (16,7%) et l'Allemagne (19,6%).
Les TIE sont inférieurs aux taux nominaux dans la plupart des pays, en particulier dans certains pays de l'UE. Le Luxembourg en est un bon exemple (2,2 % contre 29,1 %). Le taux nominal n'est pas très révélateur pour ce qui est de fournir des informations sur la charge fiscale à laquelle sont confrontées les entreprises multinationales dans de nombreux pays européens. En effet, neuf des dix pays où l'écart en points de pourcentage entre les deux taux est le plus élevé sont membres de l'UE : Luxembourg, Belgique, Malte, France, Pays-Bas, Autriche, Hongrie, Finlande et Suède. En outre, l'Allemagne, la plus grande économie de l'UE, présente l'un des écarts les plus importants en points de pourcentage (19,6% contre 29,5%).
D'autre part, certains pays présentent des TIE comparables à leurs taux nominaux, notamment l'Ukraine (TIE de 20,2 % pour un taux nominal de 20,2 %), la Bulgarie (9,5 % vs 10 %) ou la Slovaquie (20,2 % vs 21 %). Le fait que les TIE soient généralement inférieurs aux taux statutaires est naturel, étant donné les exonérations fiscales et autres dispositions fiscales qui les rendent inférieurs aux taux nominaux, mais les présents résultats révèlent l'ampleur des différences entre les pays.
De plus, la plupart des pays semblent taxer les EMN de manière régressive : plus l'EMN est grande, plus le TIE est faible. Pour la plupart des pays, il existe une relation négative entre la taille et le TIE, mesurée par un coefficient de corrélation entre la taille des entreprises multinationales par rapport au total des actifs et leur TIE. Dans l'ensemble, il y a quelques conclusions provisoires au sujet d'une course vers le bas dans les TIE à partir des sources disponibles.
TIE et taux nominaux pour la période 2011-2015 pour les pays de l'UE
Recommandations
Étant donné que ces résultats sont fondés sur les meilleures données disponibles, mais qu’elles restent imparfaites, nous demandons la publication des rapports pays par pays par les entreprises multinationales (‘country-by-country reporting’), afin d’obtenir des données plus complètes.
Par ailleurs, ces dernières années, l'UE a proposé des réformes-clés pour réduire l'évasion fiscale des grandes entreprises multinationales en Europe - telles que la déclaration publique pays par pays (CBCR) et l'assiette commune consolidée pour l'impôt des sociétés (ACCIS) - mais celles-ci sont bloquées au Conseil par les États membres.
Le Groupe des Verts/ALE au Parlement européen appelle les États membres de l'UE à mettre fin à ces blocages et à approuver les réformes nécessaires sans plus attendre.
Compte tenu des taux extrêmement bas de l'impôt sur les sociétés dans certains États membres de l'UE, la Commission européenne devrait faire une proposition visant à introduire des taux effectifs minimums d'imposition des sociétés pour mettre fin à la course fiscale vers le bas et à la concurrence malsaine dans l'Union européenne.
La Commission européenne doit enfin utiliser l'article 116 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne pour contourner le verrou de l’unanimité en matière fiscale, plutôt que de se contenter de la communication publiée le 15 janvier 2019 recommandant l’utilisation de la clause-passerelle (article 48-7 du Traité), qui requiert elle-même l’unanimité.
Country |
ETR (all) |
Nominal rate |
Italy |
30% |
31% |
Greece |
28% |
24% |
Spain |
22% |
30% |
Slovakia |
20% |
21% |
Germany |
20% |
30% |
Denmark |
19% |
24% |
Portugal |
18% |
24% |
Romania |
17% |
16% |
Poland |
17% |
19% |
France |
17% |
33% |
Malta |
16% |
35% |
Ireland |
16% |
13% |
United Kingdom |
15% |
23% |
Czech Rep. |
15% |
19% |
Croatia |
15% |
20% |
Belgium |
14% |
34% |
Slovenia |
14% |
18% |
Estonia |
14% |
21% |
Sweden |
13% |
24% |
Austria |
13% |
25% |
Lithuania |
12% |
15% |
Finland |
12% |
23% |
Latvia |
11% |
15% |
Netherlands |
10% |
25% |
Cyprus |
10% |
12% |
Bulgaria |
10% |
10% |
Hungary |
8% |
19% |
Luxembourg |
2% |
29% |